Des
voisins glaçants
IL y a des matins où il ne faudrait pas se lever. Pourtant je partais
du bon pied. Pour marcher une heure -comme me l'a prescrit mon
toubib- c'est préférable ! A peine sorti de chez moi, que vois-je
?
Un
camion de produits surgelés. Ce n'était pas la première fois qu'il
osait me défier de ses rondes. J'avais cru seulement qu'il
manoeuvrait dans les parages. Mais là non ! Il venait malmener le
voisinage.
Car
le type, en combinaison bleue polaire (ça change de marine),
déposait chez ces pauvres gens, vingt kilos de dur. Viande, poisson,
légumes et peut-être même quelques glaces. Je ne sais pas ce qui
me retint de lancer à ce dealer une bordée d'insultes :
empoisonneur, con... spirateur, con... gélateur et autre con... de
toute sorte.
Je
ne sais pas ce qui me retint, mais à froid -moins vingt au moins- je
me suis dit que le « caporal Igloo » n'était pas
réellement responsable de cette congélation des consciences et des
habitudes alimentaires. Il a, au dessus de lui, des capitaines qui
réduisent la nourriture à l'état de pierre et qui la restituent,
après un bref passage au micro-ondes à l'état de merde. Pas
uniquement pour le plaisir, mais aussi pour s'en mettre plein les
poches. Car ce qui ressort lamentable de la décongélation, n'était
guère plus recommandable lorsque c'était soi-disant frais. C'est
d'ailleurs pourquoi on n'hésite pas à lui filer un moins quarante
dans les dents, qui ne lui laisse aucune chance de se révéler. On
se consolera en se disant que le gigot néo-zélandais, le saumon de
baltique et le champignon de Biélorussie ne souffrent pas.
Non,
que des gens soient prêts à tout pour faire du pognon, que même
ceux qui n'ont aucune chance d'en faire en rêvent malgré tout, on
le sait. On en crève et j'en dégobille un peu tous les lundis dans
cette chronique.
Les
fautifs, au final ce sont les con... sommateurs. Qu'ont-ils bien
besoin, mes voisins Marcel et Rosette, de convoquer l'un de ces gros
culs morbides dès potron-minet ? Eux qui entre les deux guerres
-celle de 39/45 et celle de 2007/?- se délectèrent du breuvage
frais que leur livrait le laitier, juste avant que ne corne le
boulanger ? Hein ? Qu'est ce qui leur prend à ces deux réacs qui
trouvent que le chômage est intolérable -eux qui vécurent de leurs
rentes- et que Flamby est incompétent ? Bon, vous me direz qu'il faut
que je me calme ! A Cuers, des comme ça, on en a un sur deux...
Ouais,
ouais rigolez pas, vous en Ardèche. Ils arrivent ! Ils ont jamais vu
les poils d'un chaoui qu'ils trouvent déjà qu'il y en trop. J'ai
mis le dessin de Riss cueilli dans le Charlie de cette semaine, où
mes chères vaches d'Aubrac (ou d'ailleurs) s'inquiètent de
l'arrivée des dromadaires dans les belles prairies de notre mère
patrie.
Au
fait Marcel et Rosette n'habitent pas au fin fond de la garrigue. Ils
sont
à huit cent mètres -au pire- des commerces du village. Du
boucher-charcutier qui s'accroche encore à ses crocs mais jusqu'à
quand ? Du poissonnier qui se désespère quand ses huitres baillent
dégageant les effluves d'une haleine échouée ! Et même du
boulanger qui s'irrite de voir les jeunes du bourg sauter le petit
déjeuner pour mieux s'engraisser à la brioche américaine le reste
de la journée. Quant au marchand de journaux, lui, il a fini de
souffrir. Il a plié boutique. Remarquez, pour vendre Minute et
Paris-Match, autant que cela se passe là-bas, à trois bornes, dans
un supermarché.
Bon
! quand il pleut ou qu'il neige je ne dis pas, un truc au congélo,
c'est bien dégueu, ça tue l'élevage et l'agriculture locale, ça
trucide même les saveurs et ça occit les vitamines, mais ça
dépanne. Seulement la neige n'a pas tenu au sol à Cuers depuis
trente ans. Et quand il pleut, ils ont quand même le 4X4. Un quoi
déjà ? Un Touareg ! Un « das auto » forcément ! Une
merde de volkswagen. La voiture du peuple dont le brave Hitler
voulait que chaque foyer soit équipé. Ben ça y est, il est en
passe d'y parvenir. En tout cas, les électeurs sont là. Les
conducteurs ne vont plus tarder...
Le
Touareg se serait plutôt pour affronter le désert. Or côté dunes,
le Var c'est relativement tranquille. Et ça doit bien quand même
suffire pour la pluie. Pour faire huit cents mètres, aider le
boucher à se sortir des crocs et le poissonnier à la faire boucler
à ses mollusques.
Mais
Marcel et Rosette, qu'est-ce que vous me faites ? Parce que quand
même, je les aime bien mes voisins. Leurs chiens ne m'ont jamais
mordu, moi qui généralement possède deux mollets estampillés
«Pourtoutou». Ils me disent beaucoup de mal des autres, mais jamais
de moi, surtout quand je suis là. Il leur arrive même de me porter
un cageot de fraises... fraîches. Et ils ne manquent jamais de
venir sonner pour me livrer un perdreau ou quelques grives... Marcel
est farouchement opposé à l'avortement, mais par contre il aime
beaucoup la chasse. « Tiens -me dit-il en me tendant un journal
rempli de petits cadavres encore chauds-... tu n'as qu'à les mettre
au congélateur.
Jaco
_______________________
Dans
une actualité sportive toujours aussi dense d'inconséquences, je
crains que vous n'ayez laissé passer l'info principale du week-end.
Jason Lamy-Chappuis a pris sa retraite. A 29 ans, on peut dire que
c'est un privilégié. Ceci étant, sa discipline était doublement
exigeante.
Mais
au fait savez-vous quel sport il pratiquait, ce Jazon ? Un sport
aussi improbable que son prénom d'ailleurs ! Ne cherchez pas.
C'était le Combiné nordique. Un truc qui se pratique semble-t-il
avec une combinaison merdique. Du genre jaune fluo.
Vous
savez ce que c'est, le combiné nordique ? Ne cherchez pas. C'est un
truc où vous faites la moitié du chemin en volant et l'autre en
skiant. L'important en somme c'est de ne pas rater l'atterrissage, y
compris lorsque la compétition se déroule à Seyne-les-Alpes.
Comble
de bonheur et coup de chapeau, Jason (on ne s'en lasse pas de Jason)
termine sur un joli titre de Champion de France. Ce qui mérite
encore quelques ultimes éloges, car pour se trouver des concurrents
en combiné nordique, il fallait quand même se lever de bonne heure
!
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire